Le Magasin des Suicides de Jean Teulé

 « Vous avez raté votre vie ? Avec nous, vous réussirez votre mort ! »

Voici la devise du Magasin des Suicides tenu par la famille Tuvache depuis des générations. Aucune joie de vivre, aucune bonne humeur, aucun bon esprit n’est permis. Leur vie s’écoule alors « non » paisiblement, les clients viennent acheter de quoi « bien » mettre fin à leurs jours…
Mais les choses se mettent alors à basculer lorsque le petit dernier, Alan, se met à sourire dans son berceau…. Grande inquiétude : on ne sourit pas chez les Tuvache ! Les parents étaient pourtant déjà si fiers de leurs deux autres enfants dépressifs à souhait.
Le petit Alan va alors grandir, persévérant dans sa bonne humeur et sa joie de vivre… La famillle Tuvache et la Magasin des Suicides surmonteront-ils cette épreuve ?

Le thème m’attirait d’emblée car « drôlement » macabre… Cette étrange famille tenant ce commerce improbable mais se fondant parfaitement dans un monde contemporain (époque non marquée car histoire atemporelle ?). D’ailleurs tout le récit se concentre dans la magasin : comme aimantés, les personnages principaux comme de « passage » sont attirés par l’antre des Tuvache.

Cependant, j’ai été surprise par le style qui se veut franc et direct : j’avais un peu l’impression de lire de la famille Adams. La funeste noirceur des personnagess et de l’intrigue est trop évidente, trop flagrante, un peu « facile » et prévisible. Le roman qui se lit toutefois bien mais j’ai été un peu déçue par la façon de mener le tout : je m’attendais à quelque chose de plus subtil, de plus fin. De plus, le style de la narration est parfois grossier sans véritable raison, ce qui m’a un peu gênée.
 Je pense que ma déception vient davantage d’une fausse attente de ma part que de la qualité en soi du roman. Celui-ci possède des passages drôles et cocasses. Il faut tout simplement aborder cette lecture sans à priori et se laisser guider par les personnages et leur univers.

Un petit extrait :

« C’est un petit magasin où n’entre jamais un rayon rose et gai. Son unique fenêtre, à gauche de la porte d’entrée, est masquée par des cônes en papier, des boîtes en carton empilées. Une ardoise pend à la crémone. Accrochés au plafond, des tubes de néon éclairent une dame âgée qui s’approche d’un bébé dans un landau gris :

• Oh, il sourit !

Une autre femme plus jeune – la commerçante -, assise près de la fenêtre et face à la caisse enregistreuse où elle fait les comptes, s’insurge :

• Comment ça, mon fils sourit ? Mais non, il ne sourit pas. Ce doit être un pli de bouche . Pourquoi il sourirait ? »

 » – Le Magasin des Suicides j’écoute !

Mme Tuvache, en chemisier rouge sang, décroche le téléphone e demande de patienter : « Ne quittez pas, monsieur », tout en rendant sa monnaie à une cliente aux traits décomposés par l’angoisse. Celle-ci s’en va, portant le sac d’emballage biodégradable sur lequel on peut lire d’un côté : Le Magasin de suicides et de l’autre Vous avez raté votre vie ? Avec nous, vous réussirez votre mort ! Lucrèce salue la cliente : « Adieu, madame » puis reprend le combiné :

– Allô ? Ah c’est vous, monsieur Tchang ! Bien sûr que je me souviens de vous : la corde, ce matin, c’est ça ? Vous ? Vous vouliez nous… ? […] Nous inviter à votre enterrement ? Oh C’est gentil ! Mais vous allez faire ça quand ? Ah vous avez déjà la corde au cou ? Alors, aujourd’hui mardi, demain mercredi…donc la cérémonie aura lieu jeudi. […] Allô ? Monsieur Tchang ? … Allô ! … (puis raccroche en constatant) : les cordes c’est basique mais efficace. Faudra penser à recommander du chanvre. Avec les fêtes qui approchent… »

En fouinant pour cet article, je vois que Patrice Leconte se lance dans l’animation et fait une adaptation du roman ! Sortie prévue pour le printemps 2012…et oui, il faudra attendre un peu… D’après la bande annonce, ça me tente beaucoup ! J’aime beaucoup le style du dessin et l’histoire se prête très bien à une animation caricaturale ! J’ai hâte de le voir à sa sortie…