Dans une Antiquité imaginaire, le grand et vieux roi Tsongor, roi de Massaba, va marier sa fille. Mais un deuxième prétendant surgit, plongeant alors la jeune Samilia dans une grande confusion. D’autre part, le moment est venu pour le fidèle serviteur Katabolonga d’accomplir sa terrible promesse envers le roi. De tout cela, une horrible guerre entre Troie et Thèbes va alors se déclencher tandis que l’un des fils du roi Tsongor, Souba, doit mener à bien la funeste mission confiée par son père…
Voici le deuxième livre de Laurent Gaudé que je lis et qui m’a autant captivée que le précédent, La porte des Enfers. Le registre épique ne m’attirait pas…je me suis tout de même lancée et il m’a ensuite été impossible d’interrompre ma lecture. C’est en effet un roman épique de part ces personnages royaux, ces batailles immenses. Mais c’est aussi un roman iniatiatique où chaque personnage se découvre être des héros, chacun à leur façon. Certains se révèlent flamboyants, d’autres grands par leur simplicité, et parfois même honteux. Un roman sur l’humilité, la bravoure, la beauté des âmes qui enivre le lecteur, le transporte dans un monde imaginaire mais également au plus porfond de soi-même.
Prix Goncourt des lycéens 2002 / Prix des libraires 2003
Chapitre 1 : La grande nuit blanche du roi Tsongor
« Depuis plusieurs semaines, Massaba était devenue le coeur anxieux d’une activité de fourmis. Le roi Tsongor allait marier sa fille avec le prince des terres de sel. Des caravanes entières venaient de contrées les plus éloignées pour apporter épices, bétail et tissus. Des architectes avaient été diligentés pour élargir la grande place qui s’étendait devant la porte du palais. […] Des nomades étaient venus de loin pour être présents en ce jour. Il en arrivait de partout. Ils venaient voir Massaba. Ils venaient assister aux noces de Samilia, la fille du roi Tsongor. »
« Lorsque Tsongor se leva, il eut immédiatement le sentiment que cette journée serait trop courte pour qu’il puisse s’acquitter de tout ce qu’il avait à faire. Il respira profondément. Il savait que le calme ne lui serait plus offert jusqu’au soir. Il salua Katabolonga qui se tenait à ses côtés. Et ce visage lui fit du bien. Il salua Katabolonga, mais celui-ci, au lieu de lui rendre son salut et de lui présenter son collier royal, comme il le faisait chaque matin, lui murmura, à voix basse :
– Tsongor, je veux te parler.
– Je t’écoute, répondit le roi.
– C’est pour aujourd’hui, mon ami, dit Katabolonga.
La voix du porteur avait quelque chose d’étrange, mais Tsongor n’y prêta pas attention. Il dit simplement : « Je sais. » Et la journée commença. […] Il avait répondu mécaniquement. Sans réfléchir. S’il avait prêté attention aux traits de son vieux serviteur, il y aurait vu la tristesse profonde, comme un soupir du visage, qui peut-être lui aurait fait comprendre que ce n’était pas du mariage que parlait Katabolonga. Mais d’autre chose. De cette vieille histoire qui unissait les deux hommes depuis si longtemps. »