« La double vie d’Anna Song » Minh Tran Huy

Anna Song est une pianiste laissant derrière elle une impressionnante discographie. La maladie la condamnera et son mari voudra, de façon posthume, de rendre hommage au talent de son épouse. En effet, lors de ses dernières années, Anna consacre exclusivement son énergie à enregistrer les plus grandes œuvres musicales. Son mari s’attache alors à conserver les ultimes traces de son épouse et de son talent. Il va alors devenir le metteur en scène d’une légende que les journalistes vont s’empresser de s’approprier.

Mais le secret sera percé à jour : Anna Song n’aurait jamais enregistré une seule note de toutes ces œuvres dites légendaires… 

Pour cette œuvre, l’auteur se serait inspiré d’une histoire réelle, celle de la pianiste Joyce Hatto. Le roman est construit de plusieurs coupures de presse fictives ponctuées de clins d’œil aux réels articles suscités par ce scandale. La structure se compose alors d’un va et vient entre ces derniers et les pensées du mari confondu. Cette alternance peut être gênante car au moment où le lecteur se trouve plongé dans le passé d’Anna à travers Paul Desroches, l’auteur bascule par exemple dans une coupure de presse impersonnelle.

Cela m’a empêchée de véritablement rentrer dans le récit et de m’attacher aux personnages. Toutefois, l’enfance d’Anna Song au Viet Nam possède de beaux passages. Mais là encore, j’ai trouvé quelques longueurs dans l’évocation du pays. L’empreinte du pays et de la culture sur le personnage d’Anna et sa famille constitue parfois des tableaux plutôt poétiques. Poétique, l’écriture l’est également beaucoup…un peu trop à mon goût …Peut-être parce que je suis restée à l’extérieur de l’histoire ?

Enfin la curiosité nous poussera à connaître l’issue de ce destin si particulier ainsi que les circonstances de la dite supercherie. Serait-ce une initiative poussée par un amour trop grand pour accepter la déchéance et le départ de l’être aimé ?

« Dès que ma grand-mère a sonné, la musique s’est arrêtée. Le nuage de notes sur lequel je flottais s’est brutalement dissous, ne me laissant d’autre choix que de retomber sur terre. J’ai entendu quelques pas, vu la poignée et le visage de Mme Thi apparaître, le sourire aux lèvres. […] La perspective de la porte offrait un aperçu du salon, et en particulier du piano qui trônait en son centre. Sur le tabouret qui lui faisait face se tenait une petite fille habillée d’une robe chasuble rouge, chaussée de souliers noirs vernis. Elle gardait sur son visage un air d’intense concentration, comme si elle n’était pas tout à fait sortie du monde qu’elle était occupée à construire la minute d’avant, délicat assemblage d’harmonies et de leitmotive dont on avait peine à croire qu’il avait été tissé par des menottes d’enfant. Ca a été ma première vision d’Anna, son dos droit, son regard appuyé sous la frange impeccable, ses mains qui ne s’étaient pas encore résolues à quitter le clavier. »

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